Anthropologie structurale

Claude Lévi-Strauss en 1973

L’anthropologie structurale est une des branches fondatrices du paradigme structuraliste en anthropologie, développée à partir des années 1940 par l’ethnologue Claude Lévi-Strauss dont elle constitue l’œuvre majeure. Important en France, le terme à l'époque anglo-saxon d'anthropologie sociale (comme science générale de la société), elle vise à appliquer à cette discipline le concept à l'époque naissant de structuralisme, c'est-à-dire à expliquer la diversité des faits de société par la combinatoire d'un nombre limité de possibilités logiques liées à l'architecture du cerveau humain, en rupture avec les courants dominants de cette époque en ethno-anthropologie: évolutionnisme, diffusionnisme, culturalisme, fonctionnalisme. Elle utilise les principes généraux des sciences dites fondamentales, appréhendant une société en tant que système complexe doué de propriétés autonomes invariables (« structurales ») découlant des relations entre les éléments (les individus) qui le composent, non déductibles de l’étude de ces seuls individus et non perceptibles consciemment a priori par eux.

Les termes d’analyse (ou méthode) structurale en anthropologie ont souvent été employés indifféremment comme synonymes d’anthropologie structurale par Lévi-Strauss lui-même, qui les a fixés comme titres de plusieurs de ses articles et ouvrages. Aujourd'hui, ces différents termes restent attachés à son nom et continuent de désigner son œuvre générale et sa méthodologie, outre ses publications éponymes (Anthropologie Structurale et Anthropologie structurale deux, notamment). Pour désigner globalement l'utilisation du paradigme structural en anthropologie, chez d'autres auteurs par exemple, le terme habituellement employé est celui de structuralisme en anthropologie.

L’anthropologie structurale, issue à l'origine de filiations intellectuelles diverses d'orientation holiste (sociologie durkheimienne, ethnologie maussienne, linguistique saussurienne, phonologie, sciences naturelles, mathématiques), va progressivement développer un paradigme scientifique émergentiste très proche du courant systémique et du cognitivisme qui se constituent à la même époque, par sa prise en compte de la dialectique structure (synchronie) / histoire (diachronie), des relations au sein du système et entre systèmes, et son ambition de décrire les « enceintes mentales » humaines au sein d'une vaste science de l'homme.

Bien que Lévi-Strauss ait utilisé à ses débuts le terme de structuralisme et fait référence à la linguistique structurale, il s'est fermement et précocement, dès les années 1950, dissocié de la récupération de ses méthodes d'analyses par un vaste mouvement intellectuel transdisciplinaire d'inspiration formaliste et sémiologique, qui va capter le nom générique de structuralisme et connaître dans les années 1960 un immense succès médiatique, intellectuel et politique. Lévi-Strauss abandonnera d'ailleurs dans les années 1970 toute référence à la notion de structure, pour marquer la différence majeure de paradigme qui le sépare de l'évolution politisée et ultra-formaliste du structuralisme dit généralisé.