Vulgarisé au XIXe siècle, le mot « humanisme » renvoie à une conception du monde prenant son essor au XIVe siècle en Italie, puis au XVe siècle dans les Flandres et enfin dans l'ensemble de l'Europe occidentale, quand émerge une nouvelle classe sociale, la bourgeoisie, qui - exerçant des activités commerçantes lucratives ou politiques - s'émancipe peu à peu de l'influence de l'Église catholique. Le concept d'humanisme se caractérise donc par l'esprit de laïcité qui s'inscrit en contrepoint de la crise de confiance qui affecte l'Église : les hommes n'éprouvent plus fondamentalement le besoin de s'en remettre à Dieu pour organiser leurs vies et ils s'estiment capables d'énoncer leurs propres valeurs puis, au travers du droit et de l'intervention étatique, d'instituer les dispositifs visant à les faire respecter et appliquer.
On peut distinguer trois grandes phases dans la critique de l'humanisme [réf. nécessaire] :
Période classique. Entre le XVe siècle, moment d'éclosion de l'humanisme de la Renaissance, et le XVIIIe siècle, dit « Siècle des Lumières », le mouvement humaniste ne cesse de prendre de l'ampleur : les critiques restent éparses et, dans l'ensemble, contribuent davantage à le réorienter qu'à le contester.
Période moderne. À partir du XIXe siècle, quand le terme « humanisme » commence à être usité, la critique se développe, visant à démontrer le caractère idéologique du concept. Elle émane principalement de Marx (qui l'identifie à une propagande voilée de la bourgeoisie, lui permettant de légitimer sa domination sur le reste de la population) puis de Nietzsche, qui, à travers le thème du surhomme, pointe les risques et les enjeux de l'inflation du moi dans la civilisation occidentale. La critique prend un tournant décisif au début du XXe siècle avec Freud, qui relativise l'importance du moi dans le psychisme, face à l'inconscient ; puis, à partir des années 1960, avec les penseurs post-structuralistes français ; enfin, à partir des années 1980, avec les Américains s'inscrivant dans le courant des gender studies (études de genre), elles-mêmes nourries par le féminisme.
Période contemporaine. Au début du XXIe siècle, de moins en moins d'intellectuels se référant au concept d'humanisme : celui-ci n'est plus tant critiqué de façon théorique que par l'émergence de facto d'une nouvelle idéologie, le transhumanisme, résultant de l'impact croissant des nouvelles technologies sur la condition humaine.
Mais alors qu'en 1936, le philosophe Jacques Maritain a forgé le terme « antihumanisme » pour qualifier Marx, Nietzsche et Freud[1], différents intellectuels (notamment le Français Jacques Ellul) estimeront par la suite qu'une critique de l'humanisme ne signifie pas nécessairement un rejet du concept mais simplement sa réactualisation, au fil de l'évolution de la condition humaine, notamment au contact des technologies. Raison pour laquelle il est jugé ici préférable d'intituler cet article « Critique de l'humanisme » plutôt qu'« Antihumanisme », comme le font par exemple les anglophones (lire) ou les hispanisants (lire).
↑Jacques Maritain, Humanisme intégral : problèmes temporels et spirituels d'une nouvelle chrétienté, Paris, Fernand Aubier, , 334 p. (SUDOC016794257)