Gravures de Rembrandt

Rembrandt aux yeux hagards (B. 320), autoportrait souvent utilisé dans les couvertures de publication sur l'œuvre gravé de Rembrandt, comme dans celui du Musée du Petit Palais[1].
La Pièce aux cent florins (B. 74), chef-d'œuvre de Rembrandt, est une eau-forte rehaussée à la pointe sèche et au burin réalisée en près de 10 ans et terminée vers 1649. Rijksmuseum Amsterdam.

Les gravures de Rembrandt sont l'ensemble de la production de Rembrandt comme graveur. L'artiste est considéré comme le grand maître de l'eau-forte du XVIIe siècle.

Formé par Joris van Schooten à Leyde et surtout par Lastman, Rembrandt intègre rapidement le clair-obscur dans ses gravures. Dans un premier temps, Rembrandt produit un grand nombre d'estampes gravées au trait, à vocation commerciale. Il commence à graver à l'eau-forte vers 1625, en même temps qu'il entame sa carrière de peintre indépendant. D'abord très proche du style de Lievens, avec qui il partage son atelier, Rembrandt lui laisse les effets sculpturaux pour travailler davantage les visages et les jeux de lumière — une caractéristique qu'il développera toute sa carrière.

Installé à Amsterdam depuis 1630, Rembrandt cherche à percer sur le marché de l'art en essayant d'innover tant par les sujets que par la technique, et produit des compositions saisies sur le vif de grande qualité. À partir de 1636, Rembrandt se distingue par la maturité de son traitement des autoportraits et une représentation plus humaniste des sujets bibliques, ainsi qu'une maîtrise grandissante des techniques de gravure.

Rembrandt trouve son véritable style dans les années 1640, quoique peu productives, abandonnant un baroque parfois exacerbé pour un classicisme plus intimiste, tant pour les sujets religieux que les paysages. Il change aussi au fur et à mesure sa manière d'aborder les sujets, se concentrant sur le moment dont la tension dramatique provient de la mise en suspens de l'action. D'abord si minutieux dans le traitement des textures, Rembrandt se concentre sur la structure des objets et sur les effets lumineux, l'apogée tant en termes de composition que de technique étant La Pièce aux cent florins (achevée en 1649, après une décennie de travail). Dans les années 1650, Rembrandt est plus productif et aussi plus libéré artistiquement.

Il produit des estampes notables dans des sujets très variés : les autoportraits et portraits, les sujets bibliques et mythologiques, les scènes de genre, les paysages et autres sujets libres. La quasi-totalité des gravures de Rembrandt sont exécutées à l'eau-forte, qu'il rehausse à la pointe sèche et au burin. Sa plus grande contribution à l'histoire de l'estampe a été la transformation du procédé de gravure à l'eau-forte, qui est passé d'une technique de reproduction relativement nouvelle à une forme d'art à part entière. Ses estampes ont circulé de son vivant dans toute l'Europe, contribuant à sa grande renommée.

« Mais ce en quoi cet artiste se distingua véritablement fut une certaine manière bizarre qu'il avait inventée pour faire des gravures. Celle-ci, entièrement personnelle, ne fut jamais utilisée par d'autres ni vue depuis, et consistait en des traits de pointes de différentes forces, avec des coups irréguliers et isolés, qui créaient un profond clair-obscur d'une grande intensité. Et en vérité, dans une certaine sorte de gravure, Rembrandt était beaucoup plus estimé des professionnels que dans la peinture, dans laquelle il semble avoir eu une chance exceptionnelle plus qu'un mérite propre. »

— Philippe Baldinucci, historien de l'art et collectionneur contemporain de Rembrandt, 1681-1728[2],[3].

« Dans l'histoire de l'art graphique, il arrive rarement qu'on puisse identifier complètement une technique au génie d'un seul artiste ; cependant, on peut dire que la gravure à l'eau-forte, au XVIIe siècle, c'est Rembrandt. »

— Karel G. Boon, directeur du Cabinet des estampes du Rijksmuseum Amsterdam, 1963[4],[3].

  1. Renouard de Bussierre 1986.
  2. (it) Filippo Baldinucci, Notizie de' professori del disegno da Cimabue in qua : per le quali si dimostra come, e per chi le bell' arti di pittura, scultura, e architettura lasciata la rozzezza delle maniere greca, e gottica, si siano in questi secoli ridotte all' antica loro perfezione, Florence, Santi Franchi (6 vol.), 1681-1728 (OCLC 13594814).
  3. a et b Renouard de Bussierre 1986, p. 10.
  4. Boon 1963, p. I.