Nyingmapa

Thangka Nyingmapa avec Padmasambhava[1].

Le courant nyingma (tibétain : རྙིང་མ་, Wylie : rNying-ma, pinyin tibétain : nyinngma) ou nyingmapa ( Wylie : rNying-ma-pa, littéralement : ancienne école) est la plus ancienne des traditions du bouddhisme tibétain, adaptation à la culture tibétaine du vajrayana (ou bouddhisme tantrique) comme l'indique son nom (nyingma : ancien ; pa : courant). Elle reprend certains textes du chamanisme bön, religion traditionnelle tibétaine, voire en plagie sciemment certains[2].

Ses différentes lignées remontent à Padmasambhava, fondateur du vajrayana, qui selon une des traditions apporta le bouddhisme au Tibet[3],[4],[5],[6], le « Pays des neiges », et se basent sur la première vague de traductions du sanskrit en tibétain des tantras et des sutras. Les autres courants (principalement kagyüpa, sakyapa et gelugpa), basés sur des traductions ultérieures, sont parfois regroupés sous le terme sarmapa (nouvelle tradition). Les nyingmapa sont parfois appelés bonnets rouges, terme qui peut aussi s'appliquer aux sakya et aux kagyu, les gelugpa étant les seuls à porter des bonnets jaunes[7].

L'école nyingma est la branche la plus orientée vers les aspects ésotériques du tantrisme. À l'instar du bön qui s'en rapproche, elle comprend de nombreux maîtres laïcs mariés. L'école nyingma fait jouer un rôle central à Padmasambhava et à la dévotion au maître. C'est l'école qui détient (avec l'école non bouddhiste bön) les enseignements les plus élevés du Dzogchen. Les maîtres Dzogchen peuvent parfois adopter un comportement de folle sagesse non conventionnel. Ces caractéristiques, et l'absence de pouvoir politique depuis la deuxième transmission du Bouddhisme au Tibet, l'ont parfois désavantagée et fait considérer avec un brin de suspicion par les autres courants bien que ses pratiques les plus secrètes ont souvent été adoptées comme pratiques ultimes par de nombreux maîtres des autres écoles (incluant plusieurs dalaï-lama). Elle fait partie des cinq traditions religieuses tibétaines ayant deux représentants au sein du Parlement tibétain en exil. De plus, un chef de l'école nyingma est désigné à la suite de l'exode tibétain de 1959 et confirmé par le 14e dalaï-lama pour les premiers d'entre-eux :

Une autre caractéristique de l'enseignement nyingma, que le courant partage avec le bön, est l'existence d'une transmission directe sautant les générations. La transmission directe se fait par l’intermédiaire des termas, textes dissimulés par d'anciens maîtres, en général Padmasambhava, découverts par les tertöns (découvreurs de trésors) en tant qu'objets matériels ou visions.

Présente tout d'abord dans les régions du Tibet central, l'école s'est ensuite développée dans les régions orientales, particulièrement au Kham (Tibet oriental) où la majorité de ses pratiquants se trouvent actuellement. Les nyingmapas sont également influents au Bhoutan, au Sikkim et dans certaines régions du Népal. Comme toutes les traditions tibétaines, le courant a essaimé en Occident après l'invasion du Tibet.

  1. Cette Thangka est typiquement Nyingmapa: on reconnaît tout en haut, en bleu, le Bouddha primordial Samantabhadra avec à sa droite Vajrasattva. Samantabhadra, Vajrasattva et Padmasambhava sont souvent le Dharmakāya, le Sambhogakāya et le Nirmāṇakāya, respectivement, dans les tantras anciens des Nyingmapa. Tout en haut à gauche se trouve Amitābha et c'est probablement Avalokiteśvara qui est de l'autre côté à droite (en blanc). Amitābha est le Bouddha primordial, le Dharmakāya, des humains et Avalokiteśvara leur Sambhogakāya: c'est eux qui créèrent Padmasambhava (le Nirmāṇakāya) sous forme miraculeuse au milieu d'un lac dans le royaume d'Oddiyana. Amitābha, Avalokiteśvara et Padmasambhava apparaissent eux aussi souvent comme le Dharmakāya, le Sambhogakāya et le Nirmāṇakāya chez les Nyingmapa lorsqu'on parle de l'origine de Padmasambhava et de sa fonction auprès des êtres humains, la « famille du lotus ». À gauche de Samantabhadra se trouve probablement le Bouddha Shakyamouni, la manifestation précédente de Padmasambhava. Ce dernier est au centre de la Thangka en « Pema Jungme » (celui qui est né du lotus) entouré de ses deux épouses: Mandarava (en) et Yeshe Tsogyal. En bas se trouvent deux maîtres Nyingmapa: peut-être à gauche Longchenpa (1308-1364), le maître qui rassembla les Nhyingthik anciens (Nhyingthik Yabshyi) et à droite Jigme Lingpa (1730-1798) le maître qui découvrit les Nhyingthik nouveaux (Longchen Nyingthik). Entre eux et Padmasambhava, on voit deux protecteurs courroucés de ces enseignements: à gauche probablement begtse et à droite Senge Dongma, protectrice féminine à tête de lionne. L'ensemble représente la naissance miraculeuse de Padmasambhava sur un lotus dans le lac Dhanakosha dans le pays d'Oddiyana (actuel district de Swat) et semble symboliser toute la lignée Nyingmapa.
  2. Achard 2005.
  3. Dictionnaire Encyclopédique du Bouddhisme / Philippe Cornu, Seuil, nouvelle éd. 2006, p. 415..
  4. Philippe Cornu, Padmasambhava : la magie de l'éveil (avec la collaboration de Virginie Rouanet ; préface de Sogyal Rinpoché). Éditions du Seuil, coll. « Points. Sagesses » no 116, Paris, 1997. 275 p. (ISBN 2-02-023671-0), p. 17.
  5. Sogyal Rinpoché, Le livre tibétain de la vie et de la mort
  6. Article de Philippe Cornu dans Rituels tibétains, Visions secrète du 5e dalaï-lama, Éditions des musées nationaux, 2002, (ISBN 2-7118-4469-2).
  7. En fait, les nyingmapa ne s'appellent pas eux-mêmes les bonnets rouges. Le bonnet officiel des maîtres nyingmapa est un bonnet en forme de lotus qui symbolise Padmasambhava le « né-du-lotus ». Si la couleur rouge est bien présente, elle est très légère et il y a d'autres couleurs (dont du jaune).
  8. a et b (en) Choekyi Lhamo, Shechen Rabjam Rinpoche declines the position to head Nyingma tradition, Phayul.com, 4 février 2020
  9. « Dzogchen Rinpoche Jigme Losel Wangpo Selected as Eighth Nyingma Head | Buddhistdoor », sur www.buddhistdoor.net (consulté le )
  10. Review by Robert Mayer of Mipham’s Dialectics and the Debates on Emptiness: To Be, Not to Be or Neither. Buddhist Studies Review 23(2) 2006, 268
  11. « Association SamtenTsé France », sur samtentse.asso.fr via Wikiwix (consulté le ).